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Automatisation du métro de Paris : au tour de la ligne 4 !

Près de cinq ans après l’automatisation de la ligne 1 du métro de Paris, la RATP récidive avec la validation d’un projet similaire pour la ligne 4, la plus densément chargée du réseau. Une fois n’est pas coutume, un accord vient d’être signé avec l’entreprise Siemens qui fournira les automatismes de la ligne pour un début des travaux à partir de 2017 et une livraison complète prévue en 2022.

Il est vrai que plus de trente ans après la mise en service de la première ligne de métro automatique au monde – le VAL de Lille en 1983 – cette technologie a su s’implanter aux quatre coins de la planète, en démontrant sa fiabilité et ses nombreuses qualités. L’automatisation complète d’une ligne classique représente une étape nouvelle, déjà réussie à Paris. Cependant, les investissements consentis sont-ils à la hauteur des bénéfices escomptés ? Quels sont les réels avantages de l’automatisation intégrale d’une ligne de métro ?

L’automatisation, avec ou sans conducteur ?

Bien que la première ligne de métro automatique de Paris fût inaugurée en 1997, les premiers automatismes de conduite remontent aux années 50. En réalité, plutôt que de métro automatique, il serait plus exact de parler de métro à conduite automatique intégrale. En effet, toutes les lignes de métro avec conducteur sont aujourd’hui plus ou moins automatisées, afin de répondre à une fréquentation croissante du réseau.

Ainsi, les premiers automatismes de conduite ont-ils permis d’améliorer la régularité des services en ajoutant de l’homogénéité aux profils de conduite, par le contrôle des vitesses des trains. Ces dernières années, l’apparition des systèmes de signalisation en cabine, en remplacement des feux en bord de voie, a permis de réduire de manière significative l’intervalle entre chaque train, tout en augmentant les vitesses. C’est le principe mis en place sur les lignes à grandes vitesses (rames TGV), ainsi que sur le RER A, et qui est en cours d’introduction depuis plusieurs années sur 6 lignes du métro de Paris (projets OCTYS et OURAGAN).

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Principe du système CBTC « communication based train control »

Bien que ces lignes restent à pilotage manuel – il y a un conducteur en cabine qui contrôle l’ouverture / fermeture des portes et qui a la main sur le pilotage du train, les nouveaux systèmes de signalisation mis en place sont identiques à ceux équipant les lignes entièrement automatiques. Le principe ? Des rames capables de communiquer avec des équipements de voies (dit système CBTC), leur permettant de connaître leur position et leur vitesse relative par rapport aux véhicules qui les entourent. Ce fonctionnement permet de s’affranchir des distances habituellement fixes à respecter entre chaque rame. Simplement, le train n’est plus piloté à vue, mais suit des consignes de vitesses optimales, calculées en temps réel pour garantir la sécurité, c’est-à-dire le temps de freinage nécessaire à tout moment.

Un pas vers une meilleure régularité et une plus grande capacité de transport

Ces nouveaux systèmes de communication permettent d’augmenter la qualité de service offert aux voyageurs, en optimisant les vitesses de transport, et en réduisant l’intervalle entre les rames de près de 15 secondes dans le cas parisien, soit la capacité de transporter 15% de voyageurs en plus en heure de pointe.

Cependant, la performance intrinsèque d’un système d’exploitation ne peut apporter entière satisfaction sans prendre en compte les perturbations extérieures qui peuvent survenir. Personnes errantes sur les voies, passagers empêchant la bonne fermeture des portes : autant de situations récurrentes qui perturbent au quotidien les déplacements de milliers de voyageurs, et impactent d’autant plus une ligne que la fréquence de passage est élevée.

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Portes de quai sur la ligne 13 du métro de Paris

Plus personne ne doute aujourd’hui des bénéfices apportés par les portes palières de quai, conçues à l’origine pour les lignes à conduite automatique intégrale, afin de limiter le risque d’impact avec un objet ou une personne sur la voie. Cette innovation n’est pourtant plus l’exclusivité des lignes sans conducteur, comme nous l’a montré récemment l’introduction de portes de quai sur la ligne 13 du métro de Paris. L’objectif n’est plus d’empêcher un risque de collision – un conducteur contrôle le véhicule – mais bien de mieux gérer les flux en heures de pointe sur les quais, et la bonne fermeture des portes, afin de gagner des minutes précieuses. S’ajoute à ces portes un minutage précis du temps d’arrêt des rames à chaque station, afin de garantir une fréquence plus régulière et de maîtriser les flux entrants.

Nous venons donc de le voir, les lignes à conduite manuelle peuvent être équipées de trains communiquant entre eux, capables de connaître les distances qui les séparent et de définir leur vitesse optimale, entièrement protégée des intrusions extérieures par des portes de quais dont le temps d’ouverture est cadencé comme une horloge suisse. Dans ces conditions, que représente la plus-value d’une automatisation intégrale de la conduite comme prévue pour la ligne 4 du métro dans les prochaines années ?

L’automatisation intégrale ou comment flexibiliser l’offre de transport

L’automatisation intégrale, par la suppression du conducteur et de toute intervention humaine directe sur la rame, représente une rupture dans l’expérience de transport. Outre la maîtrise totale de l’exploitation des rames par ordinateur, elle implique l’absence de personnel à bord pour l’assistance éventuelle des passagers. Mais si cet aspect a longtemps été perçu comme une crainte pour certains usagers, il représente un levier de performance conséquent pour l’exploitation.

En effet, seule la disponibilité des rames, et non plus des ressources humaines, est nécessaire pour offrir le train driverniveau de service désiré. Ainsi, une ligne sans conducteur peut aisément permettre la circulation 24h/24 des véhicules à certaines occasions sans impliquer de négociation avec les conducteurs. Mais surtout, l’offre peut être modulée à tout instant et en temps réel. Match de foot, concert : en cas d’affluence anormalement élevée sur la ligne, la simple introduction de rames, à distance, permet de répondre à la demande.

Enfin, la requalification des métiers de conduite permet à l’exploitant d’offrir une plus grande assistance en station : accueil, information, autant d’éléments qui améliorent l’expérience voyageurs et s’ajoutent à une meilleure offre de service.

Il n’y a aucun doute, l’exploitation des lignes de métro évolue ! Même si, comme nous l’avons vu, la majorité des progrès en termes d’exploitation ne sont pas directement visibles et touchent la plupart des lignes du réseau parisien à conduite manuelle, l’automatisation intégrale reste une étape symbolique. Outre les performances de conduite, l’automatisation de la ligne 4 apportera de la flexibilité à son exploitation. Un pas de plus, s’il en est, vers une exploitation 24h/24 le weekend en s’affranchissant des contraintes pesant sur les conducteurs, comme nous l’a montré l’exemple tumultueux de Londres.

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