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A Londres, le Citymapper Pass chasse sur les terres de l’Oyster Card

Citymapper, l’application de calcul d’itinéraire, a lancé en février dernier une carte de transport à Londres baptisée Citymapper Pass. Dans un premier temps cantonnée aux zones 1 et 2 de la capitale britannique, elle permet maintenant de rallier les zones 3 et 4, et se pose plus que jamais comme un alternative sérieuse à l’Oyster Card.

Cette nouvelle offre est l’occasion de revenir sur le développement de Citymapper, entre optimisation de l’expérience utilisateur et innovation, et de présenter le nouveau Citymapper Pass.

Un calculateur d’itinéraire multimodal par l’Open Data

L’application est devenue un outil indispensable de la mobilité urbaine. Son fonctionnement est simple : elle indique à l’utilisateur le trajet optimal pour arriver à destination. Grâce à l’open data, le calculateur d’itinéraire multimodal recoupe une multitude d’informations provenant de services de mobilité différents. Réseau de transport de la ville, compagnie de VTC, trottinettes en free-floating ou vélos partagés… le trajet est calculé en quelques secondes et l’utilisateur a l’embarras du choix.

Une start-up londonienne devenue une entreprise internationale

L’aventure démarre en 2011 à Londres. Amat Yusef, ancien employé de Google, crée Busmapper, agacé par la difficulté de se repérer dans la capitale britannique. L’application intègre rapidement les trains et métros pour devenir Citymapper, puis est successivement lancée sur l’Apple Store et le Google Store.

De partenariats en partenariats, des moyens de transport alternatifs sont intégrés dans l’application, et les trajets deviennent de plus en plus intermodaux. A cela s’allonge la liste des villes couvertes par l’application. New York, Tokyo, Sydney, Lyon… ce ne sont pas moins de 40 villes aujourd’hui disponibles, sur 4 continents.

Les chiffres sont révélateurs du succès : 10 millions de dollars levés en 2014, puis 14 millions deux ans plus tard. L’entreprise a été valorisée à plus de 350 millions de dollars en 2016.

Se mettre à la place de l’utilisateur, les raisons du succès ?

« Je pense qu’une bonne application de transport est la chose la plus essentielle que vous pouvez construire sur mobile ». Tels sont les mots de son fondateur Amat Yusef, qui accorde rarement une interview sur son produit.

C’est peut-être de cette essentialité que Citymapper tire les raisons de son succès. Mais c’est sûrement aussi grâce à la simplicité de son utilisation, et à la place qu’occupe l’utilisateur. Son fondateur l’a compris, il faut embarquer l’utilisateur et le placer au centre du produit. Interface conviviale, charte graphique caractéristique, traits d’humour ou sollicitations quant au choix de la prochaine ville à intégrer rendent l’application agréable à utiliser.

En plus de cela, Citymapper compte aussi sur ses utilisateurs locaux pour enrichir l’application. A Paris, il était possible de préciser dans l’application dans quelle rame de train se placer pour gagner du temps lors d’un changement de ligne pour que Citymapper l’intègre ensuite pour les autres usagers. Au Mexique, Citymapper s’est appuyé sur des locaux pour référencer des bus non renseignés par le réseau de transport officiel.

L’innovation comme moteur

Mais plus qu’un simple calculateur de trajets multimodaux bien pensé, Citymapper ne s’est pas arrêté au développement d’une application. Parmi celles-ci, deux ont l’ambition de révolutionner la manière de concevoir une offre de transport urbain.

En plus des Smartbus initiés en 2017, 2018 marque le lancement du Smartride, un service de bus à la demande qui se positionne entre un bus traditionnel et un taxi. Les 8 navettes mises à disposition dans le cœur de Londres suivent des routes prédéfinies mais peuvent effectuer des arrêts flexibles. L’utilisateur doit réserver sa place depuis l’application ; l’algorithme adapte ensuite le trajet d’une navette pour que l’une d’entre elles puisse le récupérer à un arrêt et le déposer à son arrêt de destination le plus rapidement possible.

La même année, Citymapper s’associe avec Gett, un rival d’Uber, pour créer une nouvelle offre de mobilité. Ensemble ils lancent BB1, pour Black Bus 1, un service de partage de taxi qui repose sur un itinéraire fixe. Temps d’attente réduit, arrêt à la demande sur la ligne, plus confortable qu’un transport en commun et coût de £3 peu importe la distance, le service se pose comme une sérieuse alternative aux transports en communs classiques.

Le Citymapper Pass

Au vu du développement de Citymapper, rien ne semble étonnant quand, en 2019, la start-up annonce le lancement du Citymapper Pass. Pourtant, elle est la première à le faire, là où seule l’Oyster Card proposait des offres d’abonnement pour utiliser le réseau de transport de la ville de Londres.

En 2010, Transport For London (TFL) signe un partenariat avec MasterCard, qui rend possible l’utilisation de sa carte bleue avec paiement sans contact comme carte de transport. L’usager passe une fois sa carte sur les bornes d’entrée du métro londonien, et une fois à la sortie. Le prix est ensuite calculé selon la distance parcourue. A partir d’une certaine limite de prix journalière ou hebdomadaire, l’usager ne paye plus les trajets supplémentaires.

Le Citymapper Pass n’est autre qu’une carte prépayée Mastercard, ce qui lui permet de fonctionner comme une Oyster Card, mais sans avoir besoin de la charger. Il peut aussi être chargé sur un smartphone et être utilisé via Apple ou Google Pay.

Une offre qui favorise l’intermodalité

L’offre s’adresse aux commuters et voyageurs réguliers, et s’inscrit dans l’idée-même de sa création : offrir la meilleure expérience voyageur qui soit. Dans un premier temps disponible sur les zones 1 et 2, elle est maintenant déclinée aux zones 3 et 4.

Deux formules hebdomadaires sont disponibles. La première, la « SUPER Pass », inclut un accès illimité aux transports en commun : métro, bus et train. La seconde, la « SUPER DUPER Pass », plus onéreuse, y ajoute 30 minutes gratuites de vélo Santander en libre-service, et un crédit de £10 par semaine sur les Black Cabs de Gett et les Minicabs de Kapten, deux sociétés de VTC. Ces offres ne sont pas définitives, et viendront s’enrichir au gré des partenariats entre Citymapper et les entreprises de mobilité.

Le premier avantage du Citymapper Pass est qu’il favorise et permet la multimodalité : commence son trajet en métro, puis le terminer en vélo Santander.
Son deuxième avantage est son coût, moins élevé que l’Oyster Card. Un Citymapper SUPER Pass coûte £31 par semaine pour les zones 1 et 2, soit £4,1 de moins que l’Oyster Card. Cette économie s’élève à £4,2 pour un Pass zones 1 à 3, et £3,5 pour un Pass zones 1 à 4.

Quel Business Model pour le Pass ?

Peu d’informations sont disponibles sur le business model de la start-up, même si elle assure être rentable. Aucune discussion n’a eu lieu entre Citymapper et Transport For London (TFL), l’exploitant du réseau londonien, sur le modèle de souscription. TFL assure qu’il n’accordera pas de réduction de prix à Citymapper pour les trajets de ses souscripteurs. Cela veut dire que Citymapper devra payer à TFL la différence entre le prix de ses Citymapper Pass, et le prix d’un abonnement normal. La start-up londonienne compte alors sur ses partenariats pour proposer un service incontournable, et augmenter son pouvoir de négociation envers les entreprises de mobilité.

Comme son application de calcul d’itinéraire qui a commencé à Londres et s’est étendue dans 39 villes par la suite, Citymapper espère pouvoir étendre son Pass au plus grand nombre possible de villes pour permettre à l’usager d’utiliser la même carte, qu’il travaille à Londres ou soit en vacances à Sydney.

 

Citymapper a fait une entrée remarquée dans le monde de la mobilité ; plus qu’une application de calcul de trajets réussie, la start-up londonienne s’est essayée à réinventer la manière dont fonctionnent les transports publics à travers ses expérimentations comme Smartbus ou Smartride. Elle va aujourd’hui plus loin en proposant une carte de transport moins chère que l’opérateur historique et favorisant l’intermodalité.

 

 

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Sources :

https://www.citymetric.com/transport/what-citymapper-s-business-plan-tells-us-about-future-smart-cities-4800

https://www.helloopenworld.com/mobilite-navettes-citymapper-la-data-disrupte-les-bus-4550

https://www.standard.co.uk/tech/citymapper-smart-bus-ride-sharing-uber-a3773001.html

https://medium.com/@trucgiangnguyenhuynh/product-analysis-on-citymapper-f8b169a29785

https://venturebeat.com/2016/03/31/citymapper-now-combines-public-transport-with-cars-for-the-most-efficient-route-from-a-to-b/

https://www.theguardian.com/uk-news/2019/feb/27/citymapper-pass-launch-london-travel-card-with-cheaper-rate-than-tfl

https://www.wired.co.uk/article/citymapper

https://couriermedia.co/2017/11/24/portrait-azmat-yusuf-visionary-difficult-leader/

https://www.citymapper.com

Tristan SILVE

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