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Boost, la nouvelle filiale laboratoire d’Air France

Dévoilé en novembre dernier par le PDG d’Air France-KLM, le plan stratégique « Trust together » entend insuffler une énergie nouvelle au groupe. Déployé autour de neuf axes, ce projet offensif fixe les grandes orientations d’Air France pour les années à venir.

En particulier, ce plan s’attachera à corriger le manque de compétitivité de la compagnie française sur un marché super-concurrentiel. En effet, malgré une croissance forte du transport aérien (+7,5% de trafic de passagers en France en février 2017), Air France a vu son nombre de voyageur baisser de 1,4% en 2016. Pour remédier à cette situation, le groupe compte améliorer sa performance opérationnelle et faire progresser l’expérience client afin de proposer un service différenciant par rapport à la concurrence.

Créer une compagnie aérienne plus compétitive

Pour se faire de nouveau une place au soleil sur un marché dominé par les compagnies du Golfe sur le long-courrier et par les low-cost sur les destinations européennes, Air France va déployer une nouvelle compagnie. Son nom de code : Boost.
Derrière ce nom suggestif, le groupe souhaite faire redécoller ses activités en réduisant ses coûts d’exploitation de l’ordre de 20% par rapport à ceux d’Air France en jouant principalement sur les surcoûts liés aux salaires et aux horaires, qui sont aujourd’hui supérieurs de 50% par rapport aux compagnies low-cost européennes ! Pour atteindre cet objectif, la direction prévoit de recruter à l’extérieur les PNC (personnel navigant commercial) de la nouvelle compagnie aux conditions du marché, c’est-à-dire bien moins favorables que celles d’Air France. Les pilotes quant à eux resteraient sous contrat Air France mais la direction leur demanderait de voler davantage pour qu’ils coûtent moins cher. Toutefois, cette nouvelle filiale du groupe n’est pas à proprement parler une low-cost comme Transavia.
A mi-chemin entre une low-cost et une compagnie traditionnelle, Boost est d’abord conçue pour devenir la vitrine du groupe en terme d’innovation et d’expérience voyageur. La compagnie souhaite en effet tirer parti du digital pour améliorer sa qualité de service et proposer à ses clients un parcours optimisé de bout en bout. Côté cabine, Air France souhaite créer un design novateur en rupture par rapport à son service actuel. Elle souhaite également monter en gamme son service de restauration et assurer des standards comparables à ceux d’Air France en termes de qualité de prestation et de professionnalisme de ses équipes.

Sky

Du côté des liaisons, la compagnie opérera à 30% sur des lignes nouvellement créées. Elle permettra par ailleurs de rouvrir des lignes récemment fermées par manque de rentabilité et de conserver les certaines lignes déficitaires menacées de fermeture. La compagnie compte notamment reconquérir des parts de marché sur le long-courrier en particulier sur des vols vers le Sud-Est Asiatique et sur toutes les lignes moyen-courrier d’Air France en Europe. La liste exacte des destinations n’a pas encore été dévoilée mais elle comportera des destinations business et loisirs.

A ses débuts, la flotte sera composée d’avions de la famille Airbus A320 pour les vols moyen-courriers et d’une dizaine d’Airbus A340 pour les vols long-courriers qui seront progressivement remplacés par des A350 plus économiques et moins gourmands en kérosène. Basée à Roissy Charles-de-Gaulle, Air France souhaite également redynamiser ce hub en améliorant sa performance opérationnelle par la digitalisation d’une partie de ses opérations.

Accompagner le changement dans une entreprise empreinte d’une forte identité

Air France fait partie de ces groupes français historiques qui ont cultivé au fil des années une forte culture d’entreprise. Afin de s’affranchir des standards sociaux historiques et contraignants du groupe, depuis quelques années la direction transfère progressivement les activités d’Air France vers d’autres sociétés plus souples et donc plus compétitives. C’est d’ailleurs ce qui avait été fait avec le lancement de Transavia en 2007.

Dans ce contexte, l’annonce de la création de Boost a été accueillie avec méfiance par le Syndicat National des Pilotes de Lignes (SNPL) craignant pour une dégradation des conditions de travail. Et pour cause, le « non » est arrivé en tête de la première consultation auprès des pilotes avec la question suivante : « Approuvez-vous l’externalisation d’une partie de l’activité et de la flotte long et moyen-courrier d’Air France dans une nouvelle structure ? ». Depuis novembre, des négociations ont eu lieu entre le SNLP et la direction sur de nouveaux contrats de pilotes similaires à ceux d’Air France. Le « oui » est alors arrivé en tête du second référendum avec une majorité des 3700 pilotes de la compagnie nationale se prononçant en sa faveur (58,1%).  Cependant ce choix n’est pas partagé par les PNC (personnel navigant commercial) qui ont le sentiment de ne pas bénéficier de la même considération que les pilotes. En effet, la proposition prévoit une augmentation de productivité du personnel navigant de 7,5% sur les cinq prochaines années, ce que les syndicats perçoivent comme une augmentation des rythmes de travail. De plus, les PNC craignent un renforcement de tensions déjà palpables dans les rangs du personnel notamment entre les pilotes et hôtesses et stewards. Avec l’arrivée des nouveaux PNC sous contrat Boost, le personnel navigant d’Air France redoute également de devoir baisser progressivement son salaire pour s’aligner sur les standards de la nouvelle compagnie d’ici quelques années.

Boost pour emboiter le pas aux autres compagnies aériennes

D’autres compagnies aériennes traditionnelles ont fait le choix d’ouvrir une filiale à bas coûts pour lutter contre la concurrence féroce régnant sur le marché. Lufthansa a par exemple créé Eurowings, sa filiale à bas coûts long-courrier. Air Caraïbes également, avec le lancement en 2016 de sa filiale French Blue.Panorama des compagnies aériennes

Le nouveau projet d’Air France n’est donc pas isolé et devra se faire une place dans cet écosystème riche, dans lequel le groupe français est déjà bien présent avec ses différentes compagnies. Pour les premiers vols moyen-courriers de Boost, rendez-vous à l’automne 2017 !

Julien Joly

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