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Gyropodes et autres engins électriques sont-ils menacés ?

Vingt-six ans après l’invention de la première trottinette moderne en aluminium par Wim Ouboter, la démocratisation des engins de déplacements personnels électriques est indéniable. En France, les ventes de trottinettes, gyropodes, gyroroues et smartboard ne cessent de croître. Moins polluants qu’une voiture, plus compacts et légers qu’un vélo, ces véhicules alternatifs, longtemps considérés comme des jouets, sont devenus des moyens de transport à part entière. Mais même si l’engouement est bien réel, des problématiques émergent face à un marché qui reste en dehors des lois et génère des risques. Ces nouveaux engins électriques ne risquent-ils pas de disparaître aussi vite qu’ils sont apparus ?

Les constructeurs tentent de limiter les risques

Malgré l’aisance des « piétons roulants », le risque principal de ces engins, plutôt instables et rapides, est la chute. Même si les trottinettes et gyropodes sont assez faciles à manier, les monoroues sont plus difficiles à appréhender. Les constructeurs comme Solowheel ou Citybug tentent d’augmenter la sécurité en proposant des formations à la conduite sûre, ou en empêchant tout démarrage involontaire en l’absence de l’utilisateur, grâce à des capteurs. Le franchissement d’obstacles est également facteur de chutes. Pour améliorer ce point, des constructeurs de trottinettes (tels qu’E-Twow ou L-Trott), ou de gyroroues, proposent de nouveaux pneus « tubeless » permettant d’absorber les irrégularités du sol ainsi que des roues plus grandes (14 pouces pour certains modèles de Gotway et 18 pouces chez Solowheel). Les smartboard, quant à eux s’adaptent mal à la circulation en ville puisque leurs deux roues, trop petites, ne permettent pas de franchir les trottoirs. Les constructeurs peinent donc à rendre leur produits attractifs pour une utilisation quotidienne.gyropodes

Le risque de vol de ces appareils futuristes très chers (souvent plus de 1 000 €) peut également dissuader les potentiels acheteurs, c’est pourquoi les constructeurs travaillent activement sur ce point. Le constructeur de trottinette Micro s’est ainsi associé à Kaba, leader dans le domaine de la sécurité, pour mettre en place un nouveau concept de flotte de trottinettes en location. Ce projet pourrait servir d’exemple pour penser de nouveaux accessoires contre le vol.

Un vide juridique qui crée la confusion

Atteignant en moyenne les 15 km/h, certains engins, vendus par Gotway, peuvent atteindre les 30 km/h. C’est pourquoi l’association « Les droits du piéton » est montée au créneau pour dénoncer l’utilisation souvent dangereuse de ces engins sur les trottoirs. En Europe, aucun cadre législatif harmonisé n’est défini à ce sujet et les lois divergent d’un pays membre à l’autre.  Le Royaume-Uni a par exemple décidé d’interdire totalement l’utilisation, sur la voie publique (trottoirs et chaussées), de ces véhicules motorisés (non homologués pour la route pour la quasi-totalité). Le gouvernement belge est, quant à lui, plus mesuré puisqu’en fonction de leur vitesse maximale, ils sont autorisés soit sur les trottoirs, soit sur les pistes cyclables.

En France, on constate également une absence de réglementation claire. Le Code de la Route dispose que ces véhicules motorisés ne sont assimilés ni aux vélos ni aux scooters, mais bien à des piétons. Ils peuvent donc être utilisés sur les trottoirs s’ils ne circulent pas à plus de 6 km/h. Il est également possible pour ces engins d’emprunter les pistes cyclables si cela s’avère plus pratique. Depuis 2008, le Ministère de l’Intérieur a diffusé un Code de la rue qui définit des zones de rencontre où les piétons peuvent circuler sur la chaussée s’ils ne gênent pas les véhicules alentours. Ces textes n’introduisent cependant qu’une notion de prudence. En revanche, pour les quelques véhicules
capables de dépasser les 25 km/h, le décret 2009-911 rend obligatoire une déclaration de l’engin auprès du Ministère de l’Intérieur et interdit la circulation « sur les voies ou dans des lieux ouverts à la circulation publique ou au public ».

La réglementation « Constructeurs » reste tout aussi floue malgré l’urgence d’instaurer des normes de sécurité au vu des nombreux problèmes constatés en Europe et à l’international courant 2015. Pistes cyclablesAux États-Unis, plus d’une dizaine d’incendies, provoqués par des combustions de batteries lithium d’hoverboard, a été recensée. Au Royaume-Uni, les autorités du commerce ont saisi 32 000 hoverboard jugés dangereux. En France, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé un plan de contrôle de la conformité de ces véhicules sur le marché. Même si le but premier est de protéger les consommateurs, l’instauration d’une norme permettrait également de limiter ce que l’AFNOR qualifie de « concurrence chinoise », à savoir le fait de ne pas présenter les garanties nécessaires en termes de sécurité.

Quel est l’avenir de ce marché ?

Malgré un marché en plein essor, les constructeurs s’inquiètent : une loi aussi restrictive qu’au Royaume-Uni aurait un impact catastrophique sur leurs ventes. Ils tentent donc de s’impliquer pour travailler avec les autorités et palier à ce manque de législation. Par conséquent, Décathlon, L-Trott, Trikke, Egret, Segway et même Toyota et Honda, prennent part au groupe de travail européen, piloté par l’AFNOR, visant à mettre en place une norme d’application volontaire. Une nouvelle norme européenne qui encadre la conception de ces engins devrait par ailleurs arriver en 2016. Elle comportera deux mesures phares sur la vitesse maximale atteignable (inférieure à 25 km/h), et sur des questions de sécurité. Les constructeurs se battent également pour la mise en place d’une subvention à l’achat, comme pour les Vélos à Assistance Électrique, qui selon eux constituerait une reconnaissance de leur marché. Mais face à l’Europe, font-ils vraiment le poids ?

Coté « Utilisateurs », dans une interview, Christophe Lefèvre, fondateur et Président de New Walkings SAS (distributeur de InMotion en France), aborde l’idée d’une mise en place encadrée d’assurances pour les usagers. Le gouvernement français, quant à lui, travaille sur une nouvelle loi visant à encadrer l’usage des gyropodes sur la route, au même titre que les vélos. Certaines trottinettes électriques, comme la ZZZ 1700, ont même déjà été homologuées pour une circulation sur route et suivent les règles du Code de la route. Les constructeurs sont pourtant bien décidés à ce que ces véhicules conservent leur statut de « piétons » synonyme de ventes. Les routes ou pistes cyclables semblent malgré tout plus adaptées à l’utilisation de ces engins, ce qui soulève une question : ne faudrait-il pas d’ores et déjà mettre en place plus de pistes cyclables et de voies réservées à ces véhicules sur les trottoirs ou les routes comme l’évoque Wim Ouboter dans une interview ?

Même si les gouvernements peinent à établir des lois adaptées à ce marché émergent, une prise en compte des changements d’habitudes s’opère. Face à des constructeurs innovant d’années en années, le chemin reste long avant qu’un cadre légal clair soit instauré pour permettre à tous les modes de transports de cohabiter en toute sérénité.

Charlotte JACOB

One thought on “Gyropodes et autres engins électriques sont-ils menacés ?

  1. Compliqué en dehors des villes. Quand on voit la qualité d’entretien des chaussées. Et le signal n’est pas très bon pour les jeunes. Dans nos villages ils arrivent en patin ou en trottinettes, sur les trottoirs sans aucune prudence pour les sortis de garage. Viennent à droite ou à gauche, bousculent les piétons. Et quand ils sont sur la chaussée! le soir sans éclairage!!! De toute façon déjà les cyclistes circulent sans éclairage, sans respecter les priorités, les stop … On ne s’étonnera pas de l’augmentation des chocs. Les pistes cyclables, pourtant neuves dans notre secteur autour de Disney Paris sont gravillonnées, déjà percées de passages de canalisations, ou d’ornières de camions qui n’ont rien respecté et traversé par les pelouses en moins de 2 ans. Il faudrait alors des vignettes car ce n’est pas seulement la taxe sur le pétrole qui pourra financer ces entretiens, d’installations payés par les impôts de tous les citoyens, et des entreprises.

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