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Pluie, neige, pourquoi ne sait-on pas gérer les intempéries dans les transports en France ?

Tous les hivers, les médias de tous genres en France consacrent au moins un reportage à « l’arrivée du froid » et aux prévisions météorologiques de la saison à venir. « Hiver pluvieux », « froid » ou « clément », « intempéries », tout le jargon dédié est déployé dans chacun de ces reportages.

Certains se demandent pourquoi ces prévisions nous intéressent au point d’être un sujet de tête pour les médias, la réponse est simple : il affecte directement notre confort, certes, mais aussi notre économie. En effet, un hiver froid a une incidence sur l’économie à de nombreux niveaux : la consommation électrique accrue, le chauffage et ses incidences climatiques, et surtout la perturbation des transports de tous types : transports aériens, routiers, ferroviaires et maritimes, aucun mode de transport n’est épargné par la météo.

Comment cette situation est-elle gérée aujourd’hui à travers le monde ?

Quelles sont les conséquences des conditions climatiques sur les différents moyens de transport ?

Contrairement à une idée courante, l’hiver 2013-2014 n’a pas été clément. Selon Météo France, la « France aurait connu une trentaine de tempêtes [l’hiver dernier], soit à peu près deux fois la normale », accompagné d’un record absolu de pluies. Ces conditions ont eu des incidences importantes sur les différents moyens de transport.

chute-neige-aeroports-222796-jpg_113483Le transport aérien :

La tempête Dirk, ou « Tempête de Noël » qui a frappé la France entre le 2 et le 25 décembre a causé la fermeture de plusieurs aéroports, notamment celui de Nice dans le sud. Tout comme cette tempête, les différentes causes météorologiques peuvent modifier, retarder ou annuler des vols de passagers ou de fret. Si la météo n’est que la 6ème cause de retard de vols en 2013, elle reste la première cause d’annulation de vols, avant les pannes techniques.

Les compagnies aériennes sont bien moins frileuses en termes d’annulation de vols pour des causes météorologiques que pour d’autres types de causes. En effet, la législation européenne considère les aléas météorologiques comme des « circonstances extraordinaires » ne donnant droit à aucune indemnisation au passager.

Winter SchoolbusesLe transport routier :

Coté routes, peu d’« annulations », mais bien des perturbations dues à la météo sont constatées avec les routes bloquées par la neige, le verglas, ou les troncs d’arbres.

Les retards de livraison de marchandises, la paralysie de transports publics et divers désagréments ont lieu tous les hivers. Mais la principale préoccupation liée aux conséquences des intempéries aujourd’hui est la sécurité du ramassage scolaire. Pour le constater, il suffit de faire une recherche internet avec les mots « intempéries » et  « transports » et d’analyser les résultats : la suspension du ramassage scolaire est le résultat qui arrive en tête de liste et qui est le plus courant.

 railroad rails overnight snowfallLe transport ferroviaire :

En plus du blocage des voies de chemin de fer (par la neige par exemple) qui induit des perturbations de trafic, les conditions météorologiques fragilisent les infrastructures et le matériel ferroviaires, causant régulièrement des interruptions complètes de la circulation pour réparer le matériel abîmé. L’étendue géographique et le nombre élevé de kilomètres de chemin de fer (29 273 km en France) à entretenir ne facilitent pas la tâche des agents de Réseau Ferré de France, en charge du réseau national.

Des moyens de gestion de crise  qui fonctionnent en réaction en France …

Winter drivingEn France, la gestion des crises dues au climat s’appuie sur la caractérisation des situations qui permet une réaction optimale face à une crise météorologique. Les gestionnaires de réseaux ont à leur disposition des outils d’aide à la décision, voire des systèmes experts, qui leurs proposent des stratégies de réaction. Plusieurs plans sont mis en place afin de gérer les différentes situations, dont les « Plans intempéries » ou « Plans neige ». Ceux-ci permettent de faire face aux situations météorologiques extrêmes affectant la circulation sur le réseau routier national. Ces plans ont deux objectifs principaux :

  • Assurer un trafic fluide en conditions dégradées
  • Assurer la sécurité des personnes et apporter, une assistance et un secours aux usagers.

20140108-080217-gLes aéroports ont eux aussi mis en place leurs plans neige qui visent à maintenir le plus longtemps possible les pistes et le matériel dans des conditions opérables. Le plan neige de la société Aéoports de Paris est activé tous les hivers à l’arrivée des jours froids (15 octobre) et n’est désactivé qu’au printemps (15 avril), après les dernières gelées. D’après le communiqué de presse des Aéroports de Paris, l’annulation des vols n’est pas de leur ressort mais de celui de la DGAC (Direction Générale de l’Aviation Civile). En effet c’est la DGAC qui autorise ou non le décollage ou l’atterrissage des appareils. Par contre, les retards de vols et les activités associées au maintien des avions et des pistes en condition sont bien de la responsabilité des aéroports.

La société Aéroports de Paris joue la carte de la communication à ce sujet. Dans son infographie sur l’hiver 2013-2014, elle recense toutes les actions menées dans le cadre du plan neige. Malheureusement, cette infographie omet une information essentielle : le nombre de vols retardés ou annulés dû aux conditions météorologiques.

1340429660.2La SNCF, quant à elle, mise sur la transparence : son plan de lutte contre les conditions météorologiques hivernales est détaillé dans différents reportages sur leur site infolignes. Elle se prête aussi au jeu de la réponse à la critique sur Imagine TGV, son site communautaire autour du TGV. Finalement, elle sort aussi la carte du communiqués de presse dès les premiers risques de contretemps.

… et ailleurs, l’exemple de Montréal qui anticipe

Montréal est la ville avec le plus gros budget de déneigement au monde. Avec une moyenne annuelle de 2,20 mètres de neige, sans compter de fréquentes pluies verglaçantes, la ville a dû trouver des moyens de s’adapter à ces contraintes et de gérer cette réalité météorologique.

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Le transport aérien :

L’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal, qui accueille 12,8 millions de passagers par an et est équipé pour faire face aux conditions climatiques extrêmes. Il dispose aujourd’hui d’une réputation d’aéroport ultra-performant en matière d’enlèvement de la neige et de la glace, et s’est vu décerner en 2008 le premier prix du concours américain Balchen/Post, catégorie grands aéroports.

« Nous avons soixante-dix ans d’expérience à l’aéroport de Montréal, des équipements à la fine pointe de la technologie et un personnel très professionnel », dédiés à l’application d’un plan d’entretien hivernal rigoureux, explique Donald Desrosiers, directeur de l’entretien des installations à l’aéroport.

Son secret est triple :

Premièrement, un équipement à la pointe de la technologie, entièrement renouvelé en 2008, qui a permis de réduire le temps de déneigement. Grâce à ce nouvel équipement, souligne M. Desrosiers, « on a réduit de cinquante à vingt-cinq minutes le temps de déneigement d’une piste et des voies de circulation qui y sont associées. »

Deuxièmement, des opérations étudiées pour une perturbation minimale de l’activité « Nous nettoyons le tarmac et les pistes en fonction des horaires des vols, pour éviter les retards. »

Finalement, un plan de prévention qui permet d’éviter les situations insolvables, comme la présence de verglas sur une piste d’atterrissage qui est très difficile à supprimer par grand froid. « Le mieux, ajoute M. Desrosiers, est d’intervenir en déversant le produit avant le verglas, pour que la glace ne colle pas sur le béton »

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 Le transport routier :

Étonnamment, à Montréal, le transport routier est bien plus affecté par la neige que le transport aérien. En effet, malgré un budget de déneigement colossal (plus de 3% du budget municipal en 2008) et une organisation au point depuis des années, il est difficile de faire aussi bien que l’aéroport en terme de fiabilité. Les enjeux n’étant pas les mêmes, les moyens mis à disposition ainsi que la surface à entretenir (une ville entière) ne permettent pas la même performance. Malgré cela, même les jours de grande tempête, les principaux axes de la ville restent dégagés et ouverts à la circulation. Une situation quasi inimaginable en France lorsque plus de 2 mètres de neige tombent en une journée.

Qu’est ce qui nous manque ?

En France, les conditions climatiques extrêmes restent exceptionnelles. En effet, notre climat tempéré bénéficie une bonne partie de l’année de l’anticyclone des Açores qui nous protège des tempêtes les plus rudes. Les moyens mise à disposition ainsi que les plans neiges que nous déployons sont donc bien inférieurs à ceux mis en place dans d’autres régions du monde, comme à Montréal par exemple.

Néanmoins, mettre en place des systèmes de protection qui interviennent en amont des tempêtes, comme à l’aéroport Pierre Eliott Trudeau aiderait largement à améliorer notre gestion des tempêtes sans pour autant augmenter significativement les coûts associés à ces événements.

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