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[Autonomy] Vers une mobilité autonome, électrique, partagée et blockchainée

AUTONOMY, le festival de la mobilité urbaine, s’est tenu du 6 au 9 octobre, à la Grande Halle de la Villette, à Paris. Le salon se veut être la vitrine d’un paysage de la mobilité urbaine en constante mutation, et de nombreuses conférences ont eu lieu pour tenter d’éclairer les participants sur les tendances futures de notre mobilité.

Cette première partie de notre retour sur ce salon se concentre sur le rôle des véhicules autonomes dans la ville de demain. A l’occasion d’une des conférences, Nicolas Louvet, fondateur du bureau de recherche 6t, décrit ainsi la place que la voiture aura dans la mobilité : « La voiture est l’avenir du transport public. Son hégémonie n’est pas une fatalité, mais une nécessité »

Le véhicule de demain couplera les avancées actuelles

Le véhicule autonome est à la fois source de promesses et de peurs. Certains se réjouissent de pouvoir enfin circuler sans bouchon dans la ville tandis que d’autres appréhendent de laisser la main à une intelligence artificielle. Elon Musk annonce que dans moins de 10 ans, 50% des véhicules vendus seront autonomes. Mais savons-nous vraiment tout ce que cela implique ?

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Le concept car Rinspeed XChangE

 

Pour Robin Chase, CEO de Zipcar (n°1 de l’autopartage dans le monde), et présente à Autonomy, le véhicule autonome ne peut être pensé sans le véhicule électrique et l’auto-partage. Aujourd’hui ¾ des véhicules ne contiennent qu’une personne. C’est ce à quoi s’attaque Spiri, une jeune startup danoise, en disant « Tant que l’on ne mettra pas plus de personnes dans une voiture, l’autopartage ne résoudra rien ». Elle s’est donc lancée dans la conception de ses propres véhicules partagés. Cet enjeu est d’autant plus important, que demain, avec le développement des véhicules autonomes, c’est potentiellement la moitié d’entre eux qui pourraient rouler à vide ! Pire, les véhicules autonomes pourraient faire des tours de pâtés de maison en polluant et en encombrant les routes pour éviter de payer un parking.

Pour échapper à cela, Robin Chase propose le développement de FAVES (Fleets of Autonomus Vehicules that are Electric & Shared). Le véhicule autonome se doit donc d’être électrique et partagé. Cependant, comme le dit Hervé Richard, directeur du programme « porte à porte » de la SNCF, l’autopartage ne fonctionne pas encore très bien dans les grandes villes, à la différence du covoiturage qui explose avec près de 4 millions de trajets par jour sur Blablacar. Pour développer l’autopartage urbain, Robin Chase propose de partir d’une FAVES de 100 véhicules dans une petite ville pour les étudiants et les touristes ; ensuite, au bout de 2 ans, déployer 1000 véhicules pour remplacer la deuxième voiture et enfin essaimer dans des villes de tailles plus importantes.

Pour Robin Chase, un tel déploiement des FAVES réduira de 90% le nombre de véhicules sur la route. De plus,  le coût moyen de la voiture passera de 9000$/an à 2000$/an. Néanmoins, le coût unitaire ces véhicules sera probablement plus important ce qui nécessitera l’apparition de prestataires de mobilité. Cette économie de la fonctionnalité permettra de dématérialiser les usages comme le dit Carlo Rattin, directeur du Senseable City Lab du MIT. Si hier l’ascension sociale se matérialisait par l’achat d’une voiture, un simple selfie de ses vacances au volant d’une location relayée sur les réseaux sociaux suffit aujourd’hui à construire son estime sociale.

« Il ne faut pas penser le véhicule de demain comme une extrapolation de celui d’aujourd’hui »

Il ne faut pas voir le véhicule autonome comme une simple extrapolation du véhicule actuel, comme le dit Amish Parashar, Venture Partner chez Yamaha. Vous l’aurez compris, la mobilité de demain n’aura rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Qui dit nouvelle mobilité, dit aussi nouveaux véhicules. Tout d’abord, les voitures ne sont pas les uniques véhicules concernés par l’autonomisation. Si des métros et certain bus sont déjà autonomes, tous les véhicules peuvent potentiellement le devenir. Yamaha développe actuellement des motobots qui pilotent seuls des motos pour réaliser les essais. Cela contribue à un meilleur développement interne tout en familiarisant les utilisateurs avec de futures motos autonomes.

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MotoBot, le concept Yamaha

Pour Robin Chase, si le véhicule de demain change, ce sont tous les emplois autours qu’il faut repenser. Ainsi, aux Etat-Unis, c’est près de 12 millions d’emplois (conducteur de taxis, de fret, de bus, motoristes et revendeurs automobile) qui sont à réinventer. D’autres secteurs seront aussi touchés, comme celui de l’assurance. Aujourd’hui, 90% des accidents sont dus à une erreur humaine or l’assurance automobile représente près de 60% du CA de la MAIF. Pascal Demurger, directeur général de la MAIF, estime que même en considérant les failles logicielles et l’augmentation du prix des véhicules, c’est 50% du CA du groupe qui est menacé. Le groupe prévoit donc de faire évoluer son offre et de devenir pourvoyeur d’assurance BtoB pour les fournisseurs de mobilité en garantissant des temps de trajets. De plus, une diversification de ses actifs est déjà en cours et les investissements dans les startups se multiplient.

S’il y en a qui sont conscients de cette modification des enjeux de la mobilité, ce sont bien les startups. Durant le premier semestre 2016, elles ont levées plus de 16 milliards de dollars dans ce secteur. Dans les allées du salon, nous avons ainsi pu croiser Xee, qui commercialise un boitier pour récupérer toutes les données véhicules et permettre aux applications autorisées de les utiliser pour créer de nouveaux services (sécurisation à distance, appel d’urgence…). Chez Gazelle, on développe actuellement le premier prototype de citadine composite de 500kg adaptée à la mobilité électrique urbaine. Enfin, Lucas Dossos lance actuellement Routine qui a pour but d’utiliser toute la technologie embarquée dans nos smartphones pour rendre nos voitures autonomes. Autonomy a permis à ces startups, et à de nombreuses autres, de se faire connaitre, de rencontrer d’autres acteurs de l’écosystème urbain, et même de participer à des pitchs devant des investisseurs.

Rêvons aussi un peu, en mentionnant la présence exceptionnelle de Bibop Gresta, chairman d’Hyperloop, qui a tenu une conférence pour présenter son train magnétique sous vide dont le premier prototype fonctionnel verra le jour d’ici 2018.

De nouveaux usages palpables et plein de promesses

Cette nouvelle mobilité n’est pas qu’une douce fiction mais une réalité manifeste. Vous souhaitez voir à quoi ressemble la mobilité autonomes? Rien de plus simple, pour Robin Chase, il suffit de faire un voyage en Inde, en Chine ou dans certains pays d’Afrique. Là-bas, le coût d’un conducteur est tellement faible qu’il est courant de se faire déposer directement à son travail, de se faire livrer ses courses ou simplement de prendre un taxi pour faire une ballade en ville. C’est comme avoir des véhicules autonomes sans robot.

A quand alors ce véhicule autonome dans nos villes européennes et à quoi ressemblera-t-il ? Pour en savoir plus sur les avancées technologiques nécessaires, nous avons assisté à la conférence Autonomy de Carsten Stöcker, consultant chez Innogy Consulting GmbH, qui s’est attardé sur l’apport potentiel de la Blockchain. Cette technologie a fait son apparition avec les crypto-monnaies, comme le Bitcoin, dès 2009. Elle permet en particulier de sécuriser les transactions par validation peer to peer sans système de contrôle central. Les transactions sont anonymes, les doublons et faux sont supprimés toutes les 10 minutes. Cependant, cette technologie est encore très consommatrice d’infrastructure car l’algorithme de calculs est 105 plus consommateur en ressources que les systèmes classiques centralisés. Néanmoins, avec un doublement de la puissance de calcul tous les 5 ans et les progrès en cryptologie, cette technologie pourrait être présente, selon Carsten Stöcker, sur 1000Md$ de produits grand public à horizon 2025.

Les possibilités offertes par les contrats intelligents de la technologie Blockchain sont pratiquement infinies. Imaginez-vous être récupéré devant chez vous et déposez à votre travail en utilisant un système de transport multimodal et autonome. Vous n’aurez qu’un forfait au kilomètre à payer, la Blockchain prenant en charge tous les contrats intermédiaires. Au-delà de cet exemple, c’est toute l’automatisation de la sécurité, de l’identification, des assurances, de la maintenance, des réseaux électriques qui deviendrait possible. Des startups comme DAISEE (Decentralized Autonomous Interconnected Systems for Energy Efficiency) voient le jour.  IBM s’est déjà positionné sur cette thématique. Demain, avec la Blockchain, les véhicules autonomes ainsi que l’ensemble des machines pourront réaliser une multitude de contrats entre-elles de manière indépendante.

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Que ceux qui ont peur de lâcher leur volant se prépare à un monde dans lequel ils ne pourront plus tout contrôler. Cette évolution du monde vers le véhicule autonome va aussi de pair avec une transformation de la logistique de la ville et une collaboration entre différents acteurs publics et privés. Vous en apprendrez d’avantages sur ces sujets dans nos prochaines publications sur le salon Autonomy.

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