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Gare du Nord 2023 : L’expérience voyageur au cœur du projet de modernisation du plus grand complexe Européen

Le saviez-vous ? Les 23 premières gares les plus fréquentées au monde sont japonaises. C’est une gare française qui occupe la 24ème place : la Gare du Nord. Notre bastion français occupe donc la première place européenne.

Cela n’empêche pas les critiques de ses usagers à propos de son manque de modernité et d’espace pour circuler. Souvent comparée à son homologue britannique (Saint Pancras), la Gare du Nord fera peau neuve d’ici 2023 pour égaler son rival en termes de sophistication. Avec ses 700 000 voyageurs quotidiens, la gare française est loin devant sa cousine britannique et ses 175 000 usagers.

Les principaux défis que la Gare de Nord devra relever

Mais sur le plan de la modernité et de la sécurité, la gare française a un train de retard. Arriver à Saint Pancras est une expérience que l’on n’oublie pas : ses hauts plafonds en verre, ses halls larges et lumineux, on se sent tout de suite bien accueilli. La Gare du Nord de son côté est souvent synonyme d’insécurité. Des tapeurs en tout genre fréquentent la gare et le sol est très souvent d’une propreté douteuse, selon le Figaro (ici).

Un des objectifs adjacents à cette modernisation est de faire évoluer le quartier aux alentours. Des projets de construction d’hôtels particuliers sont en route, et feront probablement s’envoler les prix de l’immobilier.
C’est ce défi que souhaitent relever la SNCF et la ville de Paris, en se lançant dans cette rénovation de taille. Ce projet est motivé par l’augmentation continue de la fréquentation de la gare.

La future Gare du Nord 2023, vue aérienne. ©SNCF Gares & Connexions – Ceetrus – Valode & Pistre Architectes

On prévoit 800 000 voyageurs chaque jour en 2024 et 900 000 en 2030 (soit 200 000 personnes de plus qu’actuellement). Il faut donc donner à la Gare du Nord les outils pour accueillir tant de personnes. Cet agrandissement permettra de désengorger le trafic et de repenser complètement la gestion des flux.

Visuel du terminal de départ de la Gare du Nord 2023. ©SNCF Gares & Connexions – Ceetrus – Valode & Pistre

 

 

 

« La surface dédiée aux voyageurs va passer de 36 000 à 110 000 mètres carrés » annonce Patrick Ropert, PDG de Gares et Connexions. Un nouveau terminal entièrement dédié aux départs sera construit à l’étage, comme pour Eurostar actuellement. Les arrivées, elles, se feront au rez-de-chaussée. Ce système (calqué sur le modèle de circulation dans les aéroports) permettra de fluidifier la circulation.

 

 

 

 

 

La Gare du Nord sera bien plus qu’une gare

Visuel du toit de la Gare du Nord 2023. ©SNCF Gares & Connexions – Ceetrus – Valode & Pistre Architectes

Ce chantier verra naître en parallèle une myriade d’activités à l’intérieur de la gare qui sauront répondre aux envies et besoins de chacun. On prévoit un espace de co-working, une salle de spectacle, une crêche, une salle de sport ou encore un terrain de basket. Cerise sur le gâteau : une piste de trail d’un kilomètre sera construite sur le toit de la gare, offrant une vue imprenable sur Montmartre.

Cette nouvelle Gare du Nord fera peau neuve et cessera d’être un simple lieu de transit entre deux moyens de transport. Avec ces travaux, on sent la volonté de la SNCF d’intégrer la gare ferroviaire comme un nouveau quartier de la ville à part entière. La gare devient un tropisme vers lequel se structure une partie du quotidien des habitants. On y vient travailler, se cultiver et faire du sport. La gare pourrait même devenir un lieu touristique grâce à la vue qu’elle offrira sur tout Paris.

La future Gare du Nord incarnera la volonté d’intégrer les espaces de voyages dans l’horizon urbain. Il est également prévu de réaménager les parvis de la gare afin de mieux la relier au quartier.
Il est aussi question de repenser la circulation autour de la gare ainsi que son intermodalité. En effet, les accès aux lignes de métro seront améliorés, en coordination avec la RATP. 1 200 places de stationnement de vélos seront mises à disposition à la sortie de la gare, sur le parvis principal.

 

Visuel d’un des parvis de la Gare du Nord 2023. ©SNCF Gares & Connexions – Ceetrus – Valode & Pistre Architectes

 

Outre son intégration dans l’espace, la Gare du Nord sera un bâtiment intégré dans son temps. Notamment en matière environnementale, en accueillant 7 700 mètres carrés d’espaces verts et 3 200 mètres carrés de panneaux solaires. Autant d’éléments qui enrichiront le parcours voyageur et donneront cette sensation de modernité et de propreté.

Cette modernisation a un coût : environ 600 millions d’euros. La SNCF (Gares et Connexions) s’associe avec Ceetrus (en charge du projet Europacity, un complexe immobilier regroupant activités culturelles, loisirs, shopping et gastronomie), le gestionnaire et exploitant d’actifs commerciaux du Groupe Auchan. Utilisant un montage financier peu commun, ces deux acteurs vont créer une société d’économie mixte à opération unique (Semop) dans laquelle la SNCF détiendra 34% des parts, et Ceetrus 66%. Vous l’aurez compris, Gares et Connexions ne sera plus seule détentrice de ses murs.

On peut se demander pourquoi la branche immobilière du géant de la distribution est tant intéressée par ce chantier.  Les espaces commerciaux de la Gare du Nord vont passer de 10 000 à 50 000 mètres carrés. Ils représentent donc une aubaine immobilière, qui n’a pas échappée au groupe français, puisqu’il devient propriétaire de la majorité de ce complexe. Le coût des travaux sera largement remboursé sur les 40 années à venir (durée du présent contrat), grâce aux loyers payés par les exploitants des espaces commerciaux.

 

 

L’importance de l’expérience voyageur

La nouvelle Gare du Nord devrait être prête pour 2023, un an avant le début des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024. Un défi majeur se présente devant les acteurs clés du transport en France: celui de construire le cadre d’une expérience voyageur réussie. Des millions de personnes circuleront dans cette gare et il est crucial que leur parcours se déroule le mieux possible, en toute fluidité.

Visuel du terminal de départ de la Gare du Nord 2023. ©SNCF Gares & Connexions – Ceetrus – Valode & Pistre

 

Pourquoi est-ce si important ? Lorsque des millions de touristes arriveront en France pour visiter Paris et profiter des Jeux Olympiques et Paralympiques, il sera vital qu’ils gardent un bon souvenir de leur séjour en France car ils recommanderont (ou pas) à leurs proches d’y aller à leur tour.

Ce séjour commence dès que les voyageurs posent un pied dans l’aéroport ou la gare dans laquelle ils arrivent. Dans un aéroport comme dans une gare, les voyageurs vivent une vraie expérience : ils entrent, cherchent à se repérer, tentent de trouver leur hall de départ, s’y rendent, cherchent sur le tableau d’affichage leur train et son quai, accèdent à leur e-billet via la Wifi s’ils n’ont pas de réseau, vont acheter de quoi manger avant d’embarquer, montent dans le train.

Durant l’ensemble de ce parcours, les usagers ressentent des émotions, ils sont largement influencés par leur environnement extérieur et les aléas qu’ils rencontrent. Tout l’enjeu est de garantir un parcours qui se déroule en douceur afin que les voyageurs réitèrent l’expérience et voient la Gare du Nord comme un lieu agréable, une étape heureuse dans leur voyage.

 

Comment créer l’expérience voyageur de demain ?

Proposer une expérience voyageur réussie de bout-en-bout est une tâche difficile. Beaucoup d’obstacles viennent gêner durant le parcours : l’affluence des usagers en heure de pointe, la signalétique qui n’est pas toujours intuitive, la queue au niveau de la billetterie ou encore aux portiques de sécurité. Les acteurs concernés (SNCF, RATP, Thalys, Eurostar, Transilien etc.) tentent de gommer ces désagréments, non sans difficulté.
Une question demeure : comment réussir à se rapprocher d’une expérience voyageur parfaite ?

La réponse se trouve dans la coopération de tous les professionnels du tourisme pour viser, ensemble, l’amélioration de l’expérience voyageur. Lors de notre parcours expérientiel, nous traversons des zones dites « orphelines ». Ce sont ces zones du parcours client qui ne sont pris en charge par aucun opérateur.

Vous êtes par exemple dans un hôtel à Paris et vous vous apprêtez à prendre un train pour Londres. Les services rendus par l’hôtel, qui s’efforce de vous offrir une expérience client optimale pendant votre séjour, se terminent une fois passées ses portes : il n’a alors plus d’influence sur votre parcours. Entre la sortie de l’hôtel et l’entrée de la Gare du Nord, plus personne ne se charge de vous garantir une expérience agréable. Vous êtes livrés à vous-même en proie au stress, à la frustration, au retard etc. L’élimination de ces zones orphelines est la principale raison pour laquelle les acteurs du voyage et du tourisme décident de coopérer. L’objectif est de créer les conditions pour permettre une expérience voyageur sans accros, d’un bout à l’autre du parcours.

Comment y parvenir ? Les différents acteurs devront travailler main dans la main et construire cette expérience client ensemble en mettant le client au centre de toutes leurs décisions et en reléguant leurs contraintes personnelles au second plan. L’objectif de cette coopération est de créer des synergies entre les acteurs afin qu’ensemble, ils délivrent une expérience voyageur bout-en-bout.
Les opérateurs du transport parisiens (aéroports, compagnies aériennes, gares ferroviaires, transports en commun etc.) ont décidé de relever ce défi pour les JOP de Paris 2024. Ils mettent en place une démarche de co-construction de l’expérience voyageur bout-en-bout pour Paris 2024. Cette coopération porte un nom : Transcend ®.

 

L’objectif de cette coopération est pluriel :

  • Laisser un bon souvenir de la France aux millions de touristes qui viendront à Paris pour assister aux Jeux Olympiques et Paralympiques. Il est crucial que leur expérience se déroule le mieux possible afin qu’ils recommandent Paris (et la France plus généralement) comme destination.
  • Exposer au monde le savoir-faire français dans les domaines du transport et de la technologie.
  • Retenir les touristes au sein de nos frontières une fois les JOP 2024 terminés. L’objectif est de séduire les visiteurs afin qu’ils prolongent leur séjour en France, dans d’autres régions.

 

L’agrandissement de la Gare du Nord ne pourrait-il pas constituer une belle opportunité pour mettre en place un début de coopération entre les acteurs du transport, et ainsi créer les conditions d’une expérience voyageur bout-en-bout réussie ?
Dans le cadre des JOP 2024, les directeurs d’expérience client des acteurs du transport et du voyage se sont réunis autour de la table pour échanger sur comment coopérer et vers quelle finalité. Aujourd’hui nous pourrions imaginer la même chose pour la Gare du Nord : réunir les acteurs clés du transport, les enseignes commerçantes, les espaces de loisirs et Ceetrus afin de lancer des discussions sur comment coopérer pour mettre en place les conditions favorables d’une expérience voyageur réussie dans son intégralité.

 

 

Conclusion

L’aboutissement de ce projet suscite des attentes très élevées, en espérant que notre nouvelle Gare du Nord fasse rougir sa voisine britannique. La cerise sur le gâteau serait de pouvoir créer au sein de la Gare du Nord 2023 une réelle coopération entre les opérateurs du transport afin de pouvoir proposer une expérience voyageur bout-en-bout fluide et séduisante. Ce travail d’équipe n’en est qu’à ses balbutiements, mais peut aboutir sur de beaux accomplissements.

Egalement, le Charles de Gaulle Express devra faire face aux mêmes enjeux que la future Gare du Nord. Ce projet de liaison ferroviaire reliera l’aéroport Roissy Charles De Gaulle et la Gare de l’Est. Son ouverture est prévue pour 2024, afin d’accueillir et transporter les touristes venus assister aux Jeux Olympiques et Paralympiques.
Les problématiques d’expérience voyageur bout-en-bout ont ici tout leur sens. L’aéroport et la gare devront eux aussi travailler main dans la main pour offrir aux voyageurs une expérience fluide et agréable. Arriveront-ils à relever ce défi ?

 

Sources :

  1. “More countries Join the New list of 100 busiest train stations” (2013). Soranews24
  2. Lionel Steinmann, « La Gare du Nord va tripler de taille en cinq an » (Juillet 2018). LesEchos.fr
  3. « Une nouvelle Gare du Nord pour 2024 » (Juillet 2018). Communiqué de presse, Gares & Connexions.
  4. « Gare du Nord 2015-2023, Transformations » (Juin 2015). Dossier de presse, Mairie de Paris.
  5. « Paris 2024, Pour construire une expérience voyageur parisienne bout-en-bout » (2018). Transport Shaker, Wavestone.

Valentin CRESSENS

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