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Lufthansa : devenir la compagnie aérienne la plus digitale

L’année 2017 est synonyme de digitalisation pour la compagnie aérienne allemande Lufthansa. Le 1er janvier dernier s’est tenue à Francfort la première édition du Digital Forum de la marque. Leur ambition : devenir le groupe d’aviation le plus digital au monde. Pour l’atteindre : offrir aux clients une expérience personnalisée, sans coupure et sans couture, tout en maintenant leur position de leader.

Pour atteindre cet objectif, Lufthansa investit pas moins de 500 millions d’euros jusqu’en 2020, pour expérimenter 300 nouveaux projets digitaux et ainsi en ouvrir une partie au grand public. Un hub dédié à l’innovation a même été mis en place à Berlin. Comment cette digitalisation se met-elle en œuvre pour le groupe ?

 

Un parcours client digital à chaque instant

Lufthansa n’a pas attendu son premier Digital Forum pour mettre en œuvre ses premières expériences, puisque des initiatives ont déjà été lancées pour fluidifier et personnaliser l’expérience client.  Cette expérience ne commence pas à l’aéroport mais dès l’achat du billet, directement chez le client. Le transporteur a développé une fonctionnalité, HomeTag, qui permet d’imprimer l’étiquette du bagage chez soi puis de l’enregistrer à des guichets automatiques à l’aéroport. La numérisation va plus loin, une application a été développée en partenariat avec le bagagiste Rimowa permettant d’enregistrer son bagage et de suivre en temps réel sa localisation. Si la valise n’est pas chargée dans le bon avion, le client peut indiquer l’adresse à laquelle il souhaite se la faire livrer. L’application proposera alors une compensation sous forme de bons cadeaux.

Une fois arrivé à l’aéroport le passager peut se référer à l’application mobile pour se situer dans l’aéroport et savoir à combien de temps il se trouve de sa porte d’embarquement. Pour permettre cela, un système de beacons a été installé dans les aéroports de Munich et Francfort permettant de géolocaliser le passager en temps réel. Ces informations couplées à celles du SI du groupe, permettent d’informer le passager sur les endroits où il a le temps de se rendre avant d’embarquer. Ce traitement de données est rendu possible par un nouveau département chez le groupe allemand, SMILE (Surpass My Individual Lufthansa Experience) qui se concentre exclusivement sur l’exploitation de data.

Lorsque le passager est dans l’aéroport, il doit passer les contrôles, et c’est aujourd’hui l’une des expériences les plus anxiogènes lorsqu’on prend l’avion. Pour réduire cette phase de stress pour le client, Lufthansa a mis en place deux technologies actuellement en phase de test à l’aéroport de Munich :

–          La biométrie associée à une reconnaissance faciale via des caméras permet aux passagers de passer par des portiques de sécurité sans s’arrêter

–          Des beacons installés sur des portiques au sein de l’aéroport permettent en permanence d’identifier un passager

businessman pressing button on virtual screensMais une meilleure expérience client passe aussi par une digitalisation sans coupure pendant le vol.
Lufthansa a ainsi récemment inauguré la mise à disposition d’un service de Wifi haut débit à bord d’un vol long-courrier : Francfort / San José. Courant 2016, 10 avions A320 se sont vus équipés du wifi avec pour objectif un déploiement sur l’ensemble de la flotte d’A319/A320/A321 d’ici 2018. Pendant la phase pilote, ce service est gratuit. Dès le lancement commercial, une gamme de services sera proposée aux clients allant de 3 à 12€ selon l’utilisation souhaitée (mails, navigation sur Internet, streaming…).
Numériser l’ensemble du parcours client, grâce au big data et l’exploitation de données, permet d’enchanter le client, de l’inspirer et de faire naître en lui de la fascination. Aujourd’hui, la digitalisation devient une réalité concrète pour les clients qui voient leur expérience facilitée.

Quels nouveaux projets verront le jour ?

Parmi les 300 projets incubés chez Lufthansa, en voici 5 actuellement en test et qui pourraient bien changer la façon de voyager  :

–          Un Bot Messenger : Mildred. Beaucoup d’entreprises, notamment dans le secteur du transport, se dotent actuellement d’un bot pour flexibiliser l’expérience de l’achat. Il s’agit d’une Intelligence Artificielle avec qui on « tchat », via la plateforme Messenger de Facebook, comme si l’on parlait avec un ami, pour réserver un billet. Ici le bot achète les billets choisis par le client. Mildred connait les meilleurs prix sur les neuf prochains mois pour des trajets aller-retour. Le service est actuellement disponible en anglais et en allemand. Mildred interprète même des phrases comme “I would like to see the Eiffel Tower” et “I would like to cross the Tower Bridge sometime” en recherchant des billets pour Paris et Londres. Faites l’expérience !

–          Un algorithme de Machine Learning et de vision par ordinateur que les équipes de Lufthansa Industry Solutions ont développé.  Ce prototype facilite la logistique des opérateurs qui n’ont plus besoin d’aller à l’atelier pour obtenir des instructions. Ils photographient les objets (vis, écrous, boulons, etc.) à manipuler et accèdent ainsi directement à leur référence et aux indications nécessaires à leur assemblage.

–          Une technologie d’eye-tracking, développée en partenariat avec l’école Polytechnique de Zurich et la NASA, pour monitorer les performances des pilotes. Cinq caméras sont installées dans le cockpit et permettent de relever à n’importe quel moment les écrans que le pilote regarde. L’objectif est de pouvoir entraîner les pilotes à être plus réactifs.

–          Un traiteur aérien détenu par Lufthansa : LSG Group. Les Lufthansa Innovator Awards ont accompagné LSG Group dans le développement d’une application de réalité augmentée, pour mieux informer le client sur son déjeuner. La boite de déjeuner est équipée d’une image à scanner (il s’agit en fait d’un QR code), l’application propose alors une interview du chef qui explique comment le repas a été conçu et quelle est sa composition.

–          Un dispositif de diversion des clients, via de la réalité virtuelle, qui pourrait être présent dans les aéroports. Le client se place à l’horizontale sur une machine de fitness et met un casque de réalité virtuelle, il est alors transporté dans un monde à 360° et a l’impression de survoler des montagnes ; de quoi donner un avant-goût du voyage.

Ces 5 projets ne sont qu’un échantillon des nombreuses initiatives de l’entreprise allemande, qui incube, au total, près de 300 projets autour du digital. Quelle sera la réalité commerciale associée de ces innovations ? Il est encore trop tôt pour le savoir répond Christian Langer, en charge de la digitalisation du groupe.

Quelle stratégie pour Lufthansa ?

Chez Lufthansa, « la transformation digitale n’est pas une fin en soi mais une condition nécessaire au groupe pour se maintenir en tant que leader sur son marché, où la concurrence se bouscule » a rappelé Carsten Spohr, CEO, au moment de transmettre les vœux. L’objectif principal de Lufthansa en axant son développement sur la transformation digitale est bien de maintenir son positionnement de leader sur le marché européen. Avec 106 millions de passagers en 2014, Lufthansa se place devant Ryanair et Air France-KLM, en nombre de passagers transportés.

Il a également insisté sur le fait que « l’objectif ne consiste pas seulement à faire de Lufthansa, la compagnie la plus ‘digitalisée’ du monde. Il s’agit aussi de faire de Lufthansa, le groupe d’aviation le plus ‘digitalisé’ ». De fait toutes les filiales de Lufthansa sont concernées par l’investissement massif dans le digital. Lufthansa a par exemple récemment mis l’accent sur le développement d’Eurowings pour faire face à la concurrence des compagnies low-cost.

Pour rester au cœur de la transformation digitale et s’assurer qu’elle réponde aux attentes des clients, Lufthansa a lancé son laboratoire de recherche « FlyingLab ». Chaque client peut en faire partie s’il le souhaite, sans coût additionnel. Cela lui permet de découvrir les innovations, de les tester et de les noter. L’enjeu est double : obtenir rapidement un retour d’expérience de la part du client sur une technologie, un produit ou un service, dans un premier temps. Le groupe peut quasiment monitorer ses innovations en temps réel, ce qui réduit les couts de R&D. Mais en adoptant ce système de « test&learn », les futurs clients s’habituent à ces proofs of concept, la phase de prise en main est favorisée dans le cas où l’innovation serait développée pour le grand public.

Sophie MONTOUSSY

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